Le Burkina Faso, pays d'Afrique de l'Ouest, est confronté à un défi de santé publique majeur : les maladies du foie. Entre l'incidence élevée de l'hépatite virale et les difficultés d'accès aux soins médicaux modernes, de nombreuses personnes se tournent vers la médecine traditionnelle et les connaissances des guérisseurs locaux. Une étude récente, publiée dans Frontiers in Pharmacology, s'est penchée sur ces pratiques traditionnelles, offrant un aperçu précieux des plantes médicinales utilisées pour traiter les affections hépatiques au Burkina Faso.
Les maladies du foie, en particulier l'hépatocarcinome (cancer du foie), représentent un problème de santé majeur au Burkina Faso. L'hépatocarcinome se classe au quatrième rang des taux de mortalité par cancer normalisés selon l'âge, et les infections chroniques par l'hépatite virale B (VHB) sont très répandues. L'accès limité au diagnostic et au traitement appropriés exacerbe le problème, incitant de nombreuses personnes à rechercher des soins dans la médecine populaire.
L'étude a révélé que les guérisseurs traditionnels possèdent une connaissance approfondie des maladies du foie et de leurs symptômes. Les combinaisons de symptômes les plus fréquemment décrites étaient l'asthénie et la jaunisse (23,7 %), l'asthénie, la jaunisse et les douleurs aux flancs (21,7 %) et la jaunisse seule (14,3 %). Les pathologies hépatiques signalées par les guérisseurs étaient principalement la jaunisse (77,7 %), suivie de l'hépatite (13,1 %) et d'autres dysfonctionnements hépatiques non spécifiés. Il est intéressant de noter que certains guérisseurs ont pu identifier et différencier divers types d'hépatite virale, notamment l'hépatite A, B et C.
L'enquête a permis d'identifier 212 espèces de plantes différentes utilisées par les guérisseurs traditionnels pour traiter les maladies du foie. Les familles de plantes les plus représentées étaient les Leguminosae (21,4 %), les Combretaceae (16 %) et les Bixaceae (12 %). Les espèces les plus fréquemment citées étaient :
- Cochlospermum tinctorium
- Cassia sieberiana
- Anogeissus leiocarpa
- Tamarindus indica
- Terminalia avicennioides
- Carica papaya
- Cochlospermum planchonii
- Combretum micranthum
- Terminalia macroptera
Les racines et les feuilles sont les parties de la plante les plus couramment utilisées, suivies de l'écorce, des tiges feuillues et des fruits. Les préparations à base de plantes sont principalement des décoctions (69 %), suivies des macérations (8,2 %) et des poudres de plantes séchées (4,6 %).
L'étude souligne l'importance de la médecine traditionnelle au Burkina Faso et met en évidence les connaissances approfondies des guérisseurs locaux. Cependant, elle soulève également des préoccupations concernant la durabilité de la collecte des plantes médicinales, en particulier la récolte des racines. La promotion de la médecine traditionnelle doit s'accompagner de mesures de conservation pour protéger la biodiversité.
De plus, l'étude souligne la nécessité de recherches scientifiques supplémentaires pour valider l'efficacité et la sécurité des plantes médicinales traditionnelles. Bien que certaines des plantes les plus couramment utilisées aient fait l'objet d'études préliminaires, de nombreuses autres restent inexplorées. La recherche chimique et pharmacologique peut aider à identifier les composés actifs des plantes et à déterminer leur potentiel thérapeutique.
Cette étude importante jette les bases d'une collaboration plus étroite entre les guérisseurs traditionnels, les chercheurs et les professionnels de la santé. En combinant les connaissances traditionnelles avec les méthodes scientifiques modernes, il est possible de développer de nouvelles approches pour traiter les maladies du foie et améliorer la santé des populations au Burkina Faso et au-delà.
- Pistes de réflexions et de recherches futures
- Etudes cliniques : Des études cliniques rigoureuses sont nécessaires pour évaluer l'efficacité des remèdes à base de plantes traditionnels pour le traitement des maladies du foie chez les patients.
- Toxicité et sécurité : Des études approfondies de toxicité sont essentielles pour garantir la sécurité des plantes médicinales, en particulier celles qui sont utilisées en combinaison avec d'autres plantes ou médicaments.
- Durabilité : Des pratiques de récolte durables doivent être mises en œuvre pour protéger les populations de plantes médicinales et prévenir la dégradation de l'environnement.
- Partage des connaissances : Il est important de favoriser le partage des connaissances entre les guérisseurs traditionnels, les chercheurs et les professionnels de la santé afin d'améliorer la compréhension des maladies du foie et des approches thérapeutiques potentielles.
Cette étude offre un aperçu précieux des connaissances et des pratiques traditionnelles utilisées pour traiter les maladies du foie au Burkina Faso. En combinant ces connaissances avec la recherche scientifique moderne, il est possible de développer de nouvelles approches pour améliorer la santé des populations et préserver la richesse de la biodiversité africaine.
Par Dr Adama GUEMBRE
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